Les personnes en situation de handicap nécessitent une méthode analytique spécifique dans un cadre thérapeutique particulièrement contenant.

 

Il s'agit d'aider la personne à mettre en parole ce qu' "être handicapé" signifie pour elle (penser son handicap) puis ce qui fait son identité, sa singularité, en dehors du handicap (se penser soi-même). Dépasser ou limiter l'angoisse provoquée par la méconnaissance de son propre monde interne mais aussi prévenir les blessures infligées par l'image de soi ou celle renvoyée par les autres peuvent être les buts de cette thérapie.

 

Adapter la communication, favoriser l’émergence d’une parole et rendre accessible les moyens d’expression pour accompagner le patient dans la construction ou réorganisation de sa pensée et par ces biais, lui permettre d'accéder à son monde interne.

 

"Tante, dis-moi quelque chose, j'ai peur parce qu'il fait si noir. A quoi cela te servirait-il puisque tu ne peux pas me voir? Ça ne fait rien, du moment que quelqu'un parle, il fait clair" (extrait des "Trois essais sur la théorie de la sexualité" de Freud, 1905)

 

La personne présentant une déficience intellectuelle appréhende le monde qui l’entoure d’une manière particulièrement sensible. Face à l’incompréhension de ce monde,  elle est souvent envahie par ses émotions et sujette à de fortes angoisses. Son rapport à soi et son sentiment d'existence est altéré et en conséquence, la relation à l'autre, loin d'être évidente.

 

Pour se protéger de l'angoisse, la personne met en place des rituels obsessionnels particulièrement fréquents et intenses nécessaires à sa "survie" psychique mais ayant pour effet une tendance plus ou moins forte à vivre dans le monde du fantasme que du réel. Cela rend difficile les relations et peut amener à un isolement social, dont la personne va souffrir tout le long de sa vie (situation dont elle a souvent bien conscience même si elle n'en comprend pas l'origine!).

 

Les capacités de symbolisation des personnes avec une déficience mentale peuvent sembler limitées mais ne sont pas inexistantes. Elles se manifestent peu, bien souvent, parce qu’elles sont peu stimulées ou développées et mal connues.

 

Une connaissance approfondie de ce handicap associée à une méthode adaptée, me permet de proposer un cadre suffisamment contenant et structuré qui permette au patient de bénéficier d’une psychothérapie, au cours de laquelle, sa déficience vienne entraver le moins possible sa capacité à devenir Sujet.

 

Permettre d'instaurer, développer, restaurer ou bien encore renforcer, son propre « appareil à penser les pensées » (pour reprendre les termes du psychanalyste Wilfred Bion), est essentiel pour rendre capable le patient de recevoir les vécus perturbants qui lui arrivent de l’intérieur et de l’extérieur, de les « digérer » et les transformer en pensées.

 

La technique du jeu de rôle est souvent appréciée par le patient présentant une déficience intellectuelle qui, désirant une aide psychologique, mais n’étant pas pour autant « demandeur », découvre étonnamment que dans la peau d’un autre il peut (enfin !) parler et découvrir par une identification à lui-même, son propre fonctionnement mental. 

 

Pour la personne en situation de handicap, dont l'image du corps peut sembler "morcelée" et dissociée des émotions (corps-objet), cette approche peut lui permettre de développer ses "enveloppes psychiques" et d'étayer son Moi sur un moi-corporel (le "Moi-peau"), processus nécessaire pour se sentir "Etre",  "Sujet", présent et unifié.

 

Un partenariat avec d’autres intervenants pour les patients qui, pris en charge en institution, le souhaitent est possible. Une solide connaissance du réseau social et médico-social me permet d’orienter également les personnes vers des dispositifs adaptés en fonction de leurs attentes et leurs besoins.

 

Un relais est souhaitable avec l'entourage du patient ( famille, aidant à domicile, éducateur en institution ...) et son environnement. L'idée étant que toute personne intervenant de près ou de loin auprès de la personne puisse être à son tour une ressource contenante facilitant l’émergence d'une parole et sa communication (même non verbale) et que la thérapie ne se limite pas au cadre du cabinet.

 

Il s'agit bien d'être dans une coopération afin de permettre à la personne d'être la plus actrice possible dans l'expression de son identité et de ses émotions et de trouver un équilibre psychique dans son milieu, au-delà de sa relation de dépendance.

 

Une thérapie de soutien est également souhaitable à tout membre d'une famille entourant une personne en situation de handicap. Le handicap ne vient pas seulement toucher la personne concernée. Il bouleverse le système relationnel familial et retentit sur son équilibre, créant comme une sorte de fracture psychique chez certains des membres qui le composent (parfois même plus que chez la personne concernée).

 

La blessure qu'inflige à un parent le handicap de son enfant, d'ordre symbolique, et le trauma qui en découle, sont évidents. Souvent moins apparent, le trouble vient aussi se présenter chez un enfant dont le parent est en situation de handicap ou au sein d'une fratrie. Il n'est pas rare qu'un frère ou une sœur, un fils ou une fille, un grand-parent, ne soit pas lourdement impacté(e), même indirectement,  par le handicap.